Tardivement découvert, colonisé et décolonisé (les premiers Etats insulaires du Pacifique naissent dans les années 1960), le Pacifique reste une zone encore mal connue. Nombre d’analystes s’entendent néanmoins à y voir – et ce de manière quelque peu prématurée dès le début du xxe siècle - un espace d’ « avenir », en train de passer du statut de « périphérie » à celui de « centre » : « L’histoire de l’humanité a débuté par une ère méditerranéenne, elle a continué par une période atlantique et elle entre actuellement dans une phase du Pacifique » écrivait déjà le président des Etats-Unis Théodore Roosevelt, pronostique que le siècle qui s’ouvrait est loin d’avoir réalisé malgré les frasques militaires puis les performances économiques de la puissance nippone. Mais le Pacifique dont il est ici question est celui des Etats asiatiques ou américains riverains du Grand Océan, en aucun cas celui des mondes insulaires océaniens parfois minuscules disséminés dans des immensités maritimes.

Quelle place et quelle image a alors le Pacifique dans les politiques et les cultures à l’époque de la naissance de ce que l’on a appelé les « impérialismes » français et britannique ? D’autre part, des traits communs à ces îles comme la petitesse, l’éloignement ou l’isolement conduisent un peu paradoxalement à ce que leurs contacts avec l’étranger prennent des formes très diverses et que se dessinent des personnalités insulaires très différentes d’une île à l’autre. Cette variété apparaît pleinement à la fin du siècle et mérite d’être mise en évidence, par delà la mise en place de « modèles » français et britanniques dans le Pacifique. Les premières contestations de ces modèles en sont largement le fruit.