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Mercredi 22 novembre 2017 - 11 h 10
- Cinéma Jean Eustache
Vera Drake

Vera Drake
Mike Leigh
2004
125 min.
VOSTF
Londres, Oslo Street, 1950. Vera Drake fait des ménages chez les riches, mais elle est surtout connue dans son quartier comme une bonne âme toujours prête à rendre service, avec le sourire. Mais personne ne sait qu'elle est une avorteuse clandestine. Pas même Stan, son mari, garagiste employé par son frère Frank, ni ses deux enfants, Ethel et Sid…
« Film politique, Vera Drake s’inscrit dans la lignée des grands films réalistes, en présentant les contradictions d’un système social, où la femme ne peut que subir la pression des hommes et les exigences de l’honneur familial. Les figures féminines qui se succèdent entre les mains de Vera sont autant de variations d’une détresse tant physique que morale : chacune est dans une situation unique et déchirante, chacune est clairement identifiée sous le jeu d’une caméra qui soigne les visages, les expressions et prend le temps de détailler avec sensibilité une part de leur désespoir.
Si l’avorteuse opère seulement parmi les couches sociales les plus défavorisées, le réalisateur prend bien soin de montrer en parallèle le parcours « officiel » d’une jeune fille de bonne famille, dont l’avortement est ainsi cautionné par le système lui-même, qui se nie finalement au nom de la santé mentale du personnage. Critique sociale, Vera Drake souligne en permanence le contraste des conditions, en jouant sur les parallèles dans la trame du récit, puisque l’on passe durant toute la première partie du film, du travail pénible de Vera, à des scènes de la vie bourgeoise.
Par-delà la portée sociale du film, Mike Leigh réussit à donner vie à tous ses personnages, même les plus secondaires, en soignant chaque geste, en brossant chaque portrait sous la forme d’une multitude de rapides tableaux de la société qu’il met en scène. L’humanité qui s’en dégage place ainsi l’avorteuse dans une optique de bonté jusqu’à l’outrance, bonté désintéressée de cette femme qui n’est pas payée pour l’aide qu’elle apporte aux jeunes femmes.
Vera refuse à cet égard le mot « avortement » en tant que tel, devant les policiers qui l’interrogent, et répète avec ténacité qu’elle se contente « d’aider » les femmes dans le besoin.
L’ambivalence des sentiments de chaque personnage témoigne d’une justesse qui sert parfaitement le propos polémique mais nuancé du film : loin de tout manichéisme, le réalisateur présente ainsi des lieutenants de police compréhensifs et à l’écoute, qui appliquent la loi sans abuser de leur position et une famille déchirée entre son amour pour la mère et l’incompréhension de son activité clandestine. Le poids du silence qui écrase le personnage principal à partir de son arrestation symbolise ainsi avec acuité le renversement de ses propres valeurs.
Mike Leigh parvient en ce sens à capter la moindre lueur du regard, les larmes et frémissements de désespoir des visages filmés en gros plans, de manière à rendre palpable le tragique de chaque situation et les déchirements intérieurs de ses personnages, prisonniers de normes qui les dépassent. Vaste chronique réaliste d’une société qui n’est plus, le film Vera Drake fait toutefois émerger des questionnements toujours d’actualité. » – Critikat
Fiche du film
Réalisateurs(trices)
Mike Leigh
Année
2004
Durée
125 minutes
Date Sortie française
Mercredi 9 février 2005
Auteur(s) / Scénario
Mike Leigh
Format de diffusion
35 mm
Détails
Interprètes
Imelda Staunton (Vera Drake), Phil Davis (Stan Drake), Eddie Marsan (Reg), Richard Graham (George), Heather Craney (Joyce)…
Direction photographie
Dick Pope
Montage
Jim Clark
Couleur
Couleur
Distributeur
Tamasa
Musique
Andrew Dickson
Son
Tim Fraser
Producteur(trice)
Simon Channing Williams, Alain Sarde, Georgina Lowe
Pays
Grande Bretagne