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Vendredi 23 novembre 2018 - 17 h 20
- Cinéma Jean-Eustache
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En présence deFrançois Caillat
Triptyque russe

Triptyque russe
I. Vive le canal Staline ! - II. Yourii Alekseïevitch Dmitriev - III. Le bruit de la terre
François Caillat
2018
78 min.
VF
Le "Belomorkanal", canal reliant la mer Blanche à la mer Baltique, fut construit dans la Russie soviétique au début des années 1930, par des détenus du Goulag. Les conditions extrêmes de travail, les mauvais traitements, maladies et exécutions, firent des dizaine de milliers de victimes. Dans les forêts bordant le canal, un homme tente de retrouver les lieux d'inhumation, de les dénombrer, refusant que ces morts soient une fois encore oubliés.
"Vive le canal Staline" : les images d'un film de propagande d'époque du Guépéou le proclame : la réalisation de ce canal est une réussite, une chance pour des prisonniers qui peuvent travailler et se rendre enfin utiles à la société. Ils abattent les arbres par milliers, creusent à la pioche cette terre infestée de rochers. Y compris l'hiver, où l'on annonce fièrement les prouesses techniques adoptées pour maintenir l'avancée du chantier : béton et terre chauffés artificiellement. Les hommes eux se contenteront du froid et de la faim, avec la mort pour promesse.
Après 1 an et 9 mois de travail, viennent les images de danse et de liesse. Le canal est enfin achevé. Staline peut inaugurer et naviguer sur son canal. Et le Guépéou de conclure : "les meilleurs travailleurs furent décorés et libérés avant la fin de leur peine." Une fin aux allures d'un conte pour enfants, le mensonge d'une propagande cynique, passant sous silence les dizaines de milliers de prisonniers morts et les souffrances infligées.
Aujourd'hui, sur les rives du canal, un homme explore la forêt. Cheveux longs, barbichette, visage émacié, il est habillé d'un treillis, de bottes, mais ce n'est pas un chasseur. Un chasseur de mémoire en réalité, de tombes, de fosses, d'ossements de prisonniers qui ont été ensevelis ici un peu partout. En 2005, on a commencé à retrouver les premiers ossements, déterrés par des animaux. Alors Yourii Dmitriev a commencé à fouiller, à repérer les possibles fosses, comme il l'avait fait ailleurs, avant.
Il exhume, compte les corps, procède à une identification sommaire, repère l'impact d'une balle sur les crânes, signe d'une exécution, puis enterre à nouveaux, marquant les lieux de petites croix en bois. C'est sa mission, dit-il, son "fardeau" divin, refusant que ces morts soient oubliés, pour la construction d'un immense ouvrage dont il n'est plus très sûr s'il a pu être utile un jour.
Biographie du réalisateur(rice)

François Caillat
François Caillat s’intéresse aux représentations de l’Histoire : les traces, la mémoire, l’absence. Il défend une conception du ”documentaire romanesque”, qui privilégie la mise en scène et le récit.
Parmi ses réalisations récentes :
2018 : Espérance (avec Silvia Radelli)
2016 : Lettres sur l'engagement
2014 : Foucault contre lui-même
2012 : Une jeunesse amoureuse
2011 : Médecins de brousse
2008 : J.M.G. Le Clézio entre les mondes
2007 : Bienvenue à Bataville
2005 : Julia Kristeva, étrange étrangère
Fiche du film
Réalisateurs(trices)
François Caillat
Année
2018
Durée
78 minutes
Auteur(s) / Scénario
François Caillat
Format de diffusion
DCP
Détails
Direction photographie
François Caillat, Laure Chichmanov (Partie II), Jacques Besse (Partie III)
Montage
Marine Benveniste (Partie I), Sophie Brunet (Partie II)
Couleur
Couleur et N&B
Production
Tempo Films, Le Fresnoy - studio national des arts contemporains
Coproduction
Pictanovo avec le soutien de la Région Hauts-de-France
Musique
Frédéric Boulard, assisté de Thierry Bienaymé (Partie III)
Pays
France
Avec le soutien de
du Centre National du Cinéma et de l'Image animée - Avec l'aide de la Région Île-de-France, de la Spedidam